ARTICLE DE FOND
Les 7 grands principes de l’apprentissage en immersion
Frédéric Watine, DG Immersive Experience
La très bonne nouvelle de la Loi « liberté de choisir son avenir professionnel » est que la formation en situation de travail est reconnue comme une action de formation et d’apprentissage.
L’intérêt pour ce format d’apprentissage n’est pas nouveau depuis le compagnonnage au Moyen-âge et plus près de nous L’entreprise apprenante de Peter Senge. Mais il est heureux que le législateur l’institue enfin comme une forme d’apprentissage au même titre que le coaching, la validation des acquis de l’expérience etc.
Voilà 3 ans qu’Immersive Experience développe et propose des immersions pour former des collaborateurs et managers de grandes organisations aux pratiques et postures innovantes et agiles des startups.
Notre modèle est simple : nous immergeons le collaborateur de quelques jours à quelques semaines dans une startup. Il va y travailler, apporte et transmet ses expériences et compétences à la jeune pousse. En contrepartie, le collaborateur se plonge et vit les situations de travail de la startup, et peut s’approprier leurs façons de penser, exécuter, manager, piloter le business etc.
Après plus de 100 immersions pour des managers de 25 à 55 ans, issus d’entreprises aussi variées en culture et enjeux que L’Oréal, Carrefour, Total, BNP Paribas, PWC, Danone et d’autres, nous avons capitalisé sur 7 grands principes qui expliquent les succès et bénéfices des apprentissages en immersion et partages croisés d’expériences.
1/ On apprend quand on change de paradigme.
Après 5, 10, 30 années de carrière et de pratiques dans une seule et grande organisation, il est difficile de se remettre en question ; ce n’est pas forcément une forme de résistance active ou passive au changement, c’est juste qu’il est difficile de se renouveler et faire différemment en se regardant soi-même et en restant dans son environnement historique.
Changer de lieu, changer de contexte, de culture, adopter un autre regard, se mettre dans un autre rôle… Cela ouvre des horizons particuliers et permet le lâcher-prise, une opportunité de regarder le monde dans lequel nous vivons avec un autre paradigme, un autre angle de vue, ni meilleur ni moins bon, juste différent.
Rappelez-vous le film « Le Cercle des Poètes disparus » et sa phrase :
Et quoi de mieux que le surprenant monde des startups pour stimuler nos apprenants à rouvrir leurs yeux et leurs oreilles !
2/ On apprend par le challenge.
Selon les spécialistes de la connaissance, il n’existe pas de mécanisme d’apprentissage en soi. Cela ne se décrète pas. Il faut un effort, une attention consciente et volontaire, se lancer un défi pour s’intéresser au-delà de ce que je sais déjà, se confronter à de nouvelles hypothèses, les challenger en s’obligeant à raisonner, mettre en branle son intelligence.
« La pensée est rare ; nous ne mettons à penser que quand nous y sommes obligés. »
Patrick Mayen (Entretien – Université des compétences)
3/ On apprend par la pratique.
Pas besoin d’épiloguer tellement cela semble une évidence. Des statistiques un peu simplistes disent qu’on retient 10% de ce qu’on lit, 30% de ce qu’on voit, 60% de ce qu’on pratique, et 90% de ce qu’on transmet.
Les tailleurs de pierre des cathédrales il y a 8 siècles pratiquaient déjà le compagnonnage et apprenaient en observant et surtout en imitant le travail de leur tuteur. Plus près de nous, l’apprentissage en formation initiale démontre l’intérêt de mixer formation théorique et pratique.
Faire soi-même et toucher à tout dans la startup permet de décortiquer le réel.
« En fin de compte, il faut tout faire soi-même pour apprendre quelque chose » disait Friedrich Nietzsche (Par-delà le bien et le mal, 1886)
4/ On apprend au cœur de la situation de travail.
Les professeurs de théâtre ont l’habitude de dire que lorsqu’on répète sur scène devant autrui, on est autant en train de jouer que d’apprendre. Ce qu’ils veulent souligner par là est que cela ne fait plus vraiment de sens de distinguer les phases d’apprentissage et celles du travail.
Apprendre est au cœur de la situation de travail. Si on veut vraiment découvrir et s’approprier une nouvelle pratique, il faut la vivre dans son unité de temps, de lieu et d’espace. Il faut observer ensemble au moins 5 composantes en même temps : le geste, le comportement, les procédés et outils, les interactions, l’environnement.
5/ On apprend par l’analyse.
Le monde est devenu si complexe que chaque situation de travail doit s’analyser au prisme des connaissances, des savoir-faire, des postures. Mieux, une situation de travail trouvera aussi son explication dans une, deux ou trois autres situations de travail de l’entreprise.
Passer d’une situation de travail à une autre et comprendre une situation par rapport aux autres : il faut vivre la diversité et la variabilité des situations. On comprend souvent la culture d’une startup et ses processus RH quand on a observé aussi le CEO, sa façon de penser le business, les outils type Slack etc.
Comme nous l’avions écrit dans un précédent article, s’il suffisait de mettre des baby-foot pour changer une culture d’entreprise, les grands groupes auraient réussi leur transformation digitale depuis longtemps. C’est donc plus complexe que cela. Imaginer une nouvelle culture plus collaborative, plus énergique, plus autonome passe certes par un nouvel environnement de travail, mais surtout par l’expérimentation de nouvelles situations.
Vivre un cycle de startup permet de relier les relations des situations de travail. Comme disait Patrick Mayen : « Le travail doit devenir apprentissage et l’apprentissage doit devenir travail. »
6/ On apprend quand on partage.
Le programme Vis ma Vie de Startupper repose sur un dispositif de peer-to-peer learning. Moi, manager en immersion, je transmets ce que je sais, mes expériences et mes compétences. En contrepartie, j’observe, je questionne et je m’enrichis des pratiques de la startup. Les interactions que le modèle crée entre les personnes permet de s’attaquer aux apprentissages les plus complexes : l’informel.
Les échanges permanents, les questionnements réciproques, les jeux de questions-réponses à chaque nouvel étonnement de l’un ou de l’autre et le débat qui peut s’en suivre est un point-clé des apprentissages les plus informels des situations de travail, ceux les plus difficiles à acquérir mais aussi ceux qui font toute la différence.
7/ On apprend en prenant du plaisir.
En analysant les résultats des évaluations de nos apprenants au sein du programme Vis ma Vie de Startupper, nous observons une corrélation quasi directe entre la richesse des apprentissages (nombre et profondeur) et le niveau de plaisir qu’ont pris les apprenants à vivre leur immersion dans la startup ou PME d’accueil.
La fameuse dopamine favorise l’envie d’apprendre de notre cerveau, nous nous en servons. Sans vouloir créer une polémique, aller se plonger quelques jours dans une startup/PME avec d’autres gens, semble générer plus de plaisir et d’apprentissage, que d’aller s’enfermer dans une salle de classe, visionner un e-learning ou se coiffer d’un casque de réalité virtuelle seul sur le canapé de son salon.
Il y aura sans aucun doute demain un intérêt à faire entrer les neurosciences dans les méthodes et outils d’apprentissages du futur, et il s’agira alors de combiner la partie action de la formation en situation de travail (je pratique) avec la partie plus réflexive de l’apprentissage (j’analyse, je capitalise des leçons apprises).
On y réfléchit aussi chez Immersive Expérience !
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